La
viole de gambe n’est pas l’ancêtre du violon, mais
constitue une famille d’instruments totalement différente.
Apparue à Valencia vers 1470, elle fut en vogue jusqu’à la
révolution française, bien que certains en jouèrent
encore jusque vers 1800. Contrairement au violon dont la forme fut
déjà standardisée dès le milieu du 16ème
siècle, il existe une grande variété de formes
de violes de gambe, sans qu’aucun instrument n’ait jamais
atteint la qualité de modèle standard
En vérité les différences de principes de fabrication
entre 1480 et 1780 ont engendré de remarquables différences
de résultats acoustiques, de sorte qu’on ne peut pas parler
de « la » viole de gambe. Une viole italienne de la Renaissance
n’a presque rien à voir avec disons une viole anglaise
Tudor ou une viole française servant sa Majesté à Versailles.
Chaque instrument doit donc être examiné individuellement.
Mais c’est justement ce qui donne son attrait à cette
famille aux multiples facettes que vous allez découvrir ici.
La viole était à proprement parler un instrument aristocratique
dont l’étude faisait partie de l’éducation
artistique d’un gentleman, au même titre que le luth, le
clavecin, le chant Elle était utilisée principalement
dans la musique sérieuse, dans les milieux éduqués,
contrairement au violon, qui n’était employé à ses
débuts que par des musiciens professionnels et des ménestrels
pour la danse et les divertissements.
A la
Renaissance, tous les instruments étaient construits
par familles, représentant les tessitures de la voix
humaines : soprano, alto, ténor et basse. Le consort
de violes était constitué de plusieurs tailles
d’instruments, les dessus, ténors et basses étant
les plus courants. Bien que la littérature de consort
comprenne des pièces pour 2 à 7 joueurs, la combinaison
de deux dessus, deux ténors et deux basses formaient
un « assortiment de violes » qui auraient idéalement
dû être fabriquées par le même luthier.
En raison de ses accents délicats, riches et finement
nuancés, la viole était employée de préférence
dans les polyphonies, soit combinée à d’autres
voix (motets, madrigaux, chansons) ou dans des formes instrumentales
La viole a principalement été employée pour la
polyphonie : d’une part en relation avec les voix (motets, chansons,
madrigaux), d’autre part dans des formes instrumentales dérivant
de modèles vocaux (Ricercare, Canzona, Tiento et Fantasia)
Les maîtres anglais – Byrd, Ferrabosco, Gibbons, Coperario,
Lawes, Purcell – trouvèrent dans la fantaisie contrapontique
la forme par excellence dans laquelle exprimer les pensées les
plus érudites, et la poésie la plus sublime. Par respect
pour leur mérite artistique ces œuvres peuvent non seulement être
comparées aux chef-d’œuvres de la poésie et
de l’art dramatique de leurs contemporains anglais, mais aussi
aux chef d’œuvre de la musique de chambre de toutes les
périodes. Ainsi lorsque Mersenne souhaite montrer quel style
de musique convient le mieux à la viole, il choisit d’imprimer
une fantaisie à six parties de Alfonso Ferrabosco!